REPORTAGE - Traque du radon dans une cavité viticole

Quels sont les niveaux d’exposition au radon des professionnels évoluant dans des environnements souterrains, telles les cavités agricoles ? Reportage auprès d’experts, qui réalisent des mesures dans une cave viticole en Maine-et-Loire.  

La lampe frontale de Caroline Vignaud éclaire deux rangées de fûts alignés de part et d’autre d’une allée obscure. L’ingénieure du Bureau d’étude et d’expertise du radon (Berad) arpente la cave troglodyte du domaine viticole de Fouet (Maine-et-Loire). Malgré la chaleur estivale, l’air y est frais. La spécialiste recherche l’emplacement idéal pour fixer un détecteur passif de ce gaz. « Dans cet environnement confiné, nous souhaitons positionner un détecteur tous les 200 m2, en privilégiant les secteurs peu aérés et fréquentés par les employés », précise-t-elle. Une fois installé, chaque détecteur restera en place au minimum deux mois.
Cette campagne de mesure s'inscrit dans une étude nationale1 réalisée par l’IRSN à la demande de la Direction générale du travail (DGT) et du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire (MAA). Réalisée en été, elle sera réitérée en hiver pour tenir compte de l’influence des conditions météorologiques sur l’évolution de la concentration en radon. En règle générale, ce gaz radioactif est plus présent dans les cavités en période estivale en raison de la différence de température plus marquée avec le milieu extérieur, qui limite les échanges d’air. Mais ce n’est pas une règle absolue.  
Au cours de leurs investigations souterraines, les experts relèvent la température, l’hygrométrie, l’emplacement des systèmes de ventilation, la configuration de la cavité, le type de roches et matériaux de construction, le nombre de travailleurs intervenant dans les locaux, leurs postes de travail et le temps passé en moyenne par jour, etc. Autant de paramètres utiles pour affiner la connaissance du risque.  
Lancée en 2021, l’étude diligentée par la DGT et le MAA vise à mesurer l'exposition des travailleurs agricoles évoluant dans des cavités souterraines agricoles, comme ​​les caves viticoles, les champignonnières ou les cavités dédiées à l'affinage des fromages. Elle porte sur une quarantaine de sites. « Au-delà d’une activité annuelle moyenne de 300 Bq/m3, l’employeur doit veiller à réduire2 l’exposition », rappelle Caroline Vignaud.   
 

1. Menée dans plusieurs régions : Grand-Est, Pays de la Loire, Bourgogne-Franche-Comté et Auvergne-Rhône-Alpes
2. Dans ces cavités où l’humidité et la température doivent être constantes pour les activités agricoles, le renforcement de la ventilation est souvent proscrit. Les actions de radioprotection reposent si besoin sur la réorganisation des postes ou du temps de travail

Fixation d’un détecteur passif de radon dit fermé. Ce dispositif mesurant quelques centimètres est adapté aux milieux poussiéreux et humides que sont les cavités agricoles. Les rayonnements alpha émis lors de la formation des descendants du radon

Fixation d’un détecteur passif de radon dit fermé. Ce dispositif mesurant quelques centimètres est adapté aux milieux poussiéreux et humides que sont les cavités agricoles. Les rayonnements alpha émis lors de la formation des descendants du radon laissent une trace sur le film du détecteur. Plus il y a de radon, plus il y a de traces. 

Pose de détecteurs radon dans la cave viticole du Domaine ALLIANCE-LOIRE à Bellevigne-les-Châteaux près de Saumur

Caroline Vignaud et Laurent Destacamp, spécialistes du radon, référencent l’emplacement d’un détecteur passif de radon dans le local de la chaîne d’embouteillage d’une cave viticole.

Pose de détecteurs radon dans la cave viticole du Domaine Fouet à Bellevigne-les-Châteaux près de Saumur

Les spécialistes disposent un moniteur dans une cave viticole du Maine-et-Loire. Laissé en place pendant vingt-quatre heures, il permet de suivre l’évolution en temps réel de la concentration en radon sur une journée de travail.

Pose de détecteurs radon dans la cave viticole du Domaine ALLIANCE-LOIRE à Bellevigne-les-Châteaux près de Saumur.

Ce moniteur enregistre en continu la concentration du radon, la température et l’humidité, grâce à un système de diffusion d’air dans une chambre d’ionisation.

Reportage photo : © Philippe Dureuil/Médiathèque IRSN


Article publié en janvier 2024