Radon et Établissements recevant du public : un risque peu connu

Cancérigène reconnu, le radon – émanation naturelle du sous-sol – est inégalement réparti en France. Cartes, application mobile… des outils sont mis à la disposition de la population sur ce risque radiologique. En cas d’alerte, des spécialistes accompagnent les particuliers et les établissements recevant du public (ERP). 

Un ingénieur de l’Institut mesure les concentrations du radon dans une maison bretonne.
Un ingénieur de l’Institut mesure les concentrations du radon dans une maison bretonne - © Olivier Seignette/Mikaël Lafontan/IRSN

« Dans les maisons peu ventilées, bien isolées dans leurs soubassements, le radon peut s’accumuler en des quantités importantes », expose Michel Baudry, expert en surveillance de l’environnement. Ceci accroît le niveau d’exposition ; or, ce gaz radioactif est le deuxième facteur de risque de cancer du poumon après le tabac1.  
Depuis 2018, le code de l’environnement prévoit une information préventive de la population. Dans les communes à potentiel significatif – zone 3 –, vendeurs ou bailleurs doivent informer les acquéreurs ou les locataires de l'existence de ce risque.  

Carte en poche

Massif armoricain, Massif central, Corse, Vosges, le radon émane plus particulièrement de formations géologiques riches en uranium. Il est omniprésent dans l’environnement mais en concentration plus importante dans des massifs granitiques ou volcaniques, certains grès et schistes noirs. Sa répartition est inégale dans l’Hexagone. Sur irsn.fr, une carte de France indique ce « potentiel radon géogénique »2
À Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine), des scientifiques se chargent d’améliorer la cartographie du potentiel radon. « Nous savons que certaines zones karstiques présentent des problématiques radon, malgré les faibles teneurs en uranium de la roche, expose Claire Gréau, experte radon. Nos études visent à améliorer nos connaissances sur les phénomènes à l’origine des niveaux de radon dans ces zones et à faire évoluer la cartographie si nécessaire. » Cette approche cartographique du potentiel radon classe les communes en trois catégories. Les catégories 1 et 3 regroupent respectivement celles ayant un potentiel faible et celles ayant un potentiel significatif. La catégorie 2 réunit les communes avec un potentiel faible mais avec des facteurs géologiques favorisant le transfert de ce gaz vers les bâtiments. 
Pour sensibiliser le public, l’Institut déploie depuis 2020 une application mobile. L’utilisateur accède au potentiel radon de sa commune. Elle comptabilise plus de 5 000 téléchargements. Des contenus pédagogiques expliquent les risques, les possibilités de réduction de l’exposition, etc. 

Limiter l’entrée du radon et le diluer

La réglementation française fixe un niveau de référence à 300 Bq/m3 en valeur moyenne annuelle pour la gestion du risque lié à l’exposition au radon dans l’air intérieur. Souvent, des solutions simples suffisent pour réduire l’exposition : une plus grande fréquence de l’aération, l’amélioration des systèmes de ventilation, de l’étanchéité du soubassement avec le sol...  
En 2011, une première initiative5 de démarche pluraliste voit le jour en Bourgogne-Franche-Comté, où le radon est intégré dans une approche globale de qualité de l’air intérieur et de performance énergétique des bâtiments. Elle définit des moyens et outils à mettre en œuvre à un niveau local. Dans le cadre du projet franco-suisse « Jurad-Bat6 », des volontaires bénéficient d’un kit de mesure et sont accompagnés dans leurs démarches de prévention. 
Quatre ans plus tard, « Radon changement d’air, relevons le défi7 », en Haute-Vienne, procède à huit-cents diagnostics dans quinze communes. « Cinquante-trois personnes engagent des actions de remédiation : isolation de l’interface sol/bâti, ventilation…, indique Sylvie Charron, spécialiste d’ouverture à la société. Les concentrations sont passées en moyenne de 1 663 à 630 Bq/m3. C’est encourageant. Toutefois, cela suppose un accompagnement du particulier tout au long du processus. »  
Un état des lieux plus global établi sur le territoire français par l’IRSN révèle qu’il reste très compliqué pour les particuliers de dépasser l’étape de la mesure et de passer aux actions de réduction. « Les professionnels du bâtiment sont difficiles à mobiliser sur cette thématique, autant sur l’expertise du bâtiment que sur les travaux de réduction », remarque Cynthia Réaud, chargée de mission ouverture à la société.

Le kit radon comprend un dosimètre et des documents d’information à destination des habitants
Le kit radon comprend un dosimètre et des documents d’information à destination des habitants - © Laurent Zylberman/Graphix Images/IRSN

Du diagnostic à l’action

Certains établissements recevant du public (ERP) ont l’obligation de réaliser des mesures et des réductions de l’exposition au-delà de 300 Bq/m3.  
Informées de forts dépassements – 1 000 Bq/m3 ou plus – dans certains ERP, comme des écoles, les divisions locales des Agences régionales de santé (ARS) et de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sollicitent parfois l’IRSN. Les experts réalisent des mesures sur place. « D’une pièce à une autre, d’un étage à un autre, les valeurs peuvent fortement varier », détaille Michel Baudry. Si le risque est confirmé, des gestes simples sont conseillés : aérer plusieurs fois par jour, déplacer un dortoir par exemple… avant d’engager des aménagements pérennes pour réduire les expositions. 

1. Classement du Centre international de recherche sur le cancer depuis 1987

2. Connaître le potentiel radon de ma commune

3. Radon & Radioactivité : l'IRSN sensibilise le grand public à l'exposition à la radioactivité naturelle et artificielle

4. Plan national santé environnement 4 (PNSE 4) et Plan national d’action radon (PNAR) 2020-2024, voir sur solidarité santé

5. Avec Pays de Montbéliard agglomération, l’ARS et Atmo Franche-Comté. 

6. https://jurad-bat.net/

7. Lancée avec la Communauté de communes Élan (Limousin Avenir Nature) et le soutien du lycée des métiers du bâtiment de Felletin. 


Article publié en janvier 2024