Zoom

Une photo scientifique étonnante est décryptée par un chercheur de l’IRSN. A chaque article, plongez au cœur des expérimentations et des résultats qui font avancer la science.

Cobra, vigie du béton

Vous croyez observer un tableau d’art moderne ? Il s’agit en fait d’un bloc en béton armé fissuré représentatif d’une partie de l’enceinte de confinement d’un réacteur nucléaire. C’est sur cette maquette du programme de recherche Cobra que sept chercheurs, techniciens et doctorants spécialisés en génie civil et en aéraulique mènent leurs travaux.

Explosion numérique

Un Van Gogh retrouvé dans le grenier d’un particulier ? Non, ce visuel est la simulation numérique d’une explosion de méthane injecté dans un tube contenant des obstacles qui favorisent le mélange du gaz. Image après image, on distingue un front de flamme qui avance et accélère du fait de la turbulence engendrée par l’écoulement dans le sillage des obstacles. Plus les couleurs tendent vers le rouge, plus le gaz se déplace vite.

Un œil sur la biodiversité

Que voyez-vous sur cette photo ? Un œil de grenouille ? Vous avez raison. Plus précisément, une grenouille vivant dans la zone d’exclusion de Tchernobyl. Sur ce territoire, les activités humaines restent encore de nos jours interdites. En quelques décennies, il est devenu un refuge pour la biodiversité – lynx, loups, ours… – et un laboratoire pour les scientifiques. Le retour des grands mammifères laisse de prime abord penser que ces zones sans humains seraient un paradis sur terre. Mais qu’en est-il ? Cette région est-elle vraiment un havre de paix ou reste-t-elle, au contraire, inhospitalière pour la vie sauvage ? Des scientifiques du Laboratoire de recherche sur les effets des radionucléides sur les écosystèmes (Leco), à Cadarache, dans les Bouches-du-Rhône, mènent des travaux pour répondre à ces questions. Clément Car, chercheur en écologie, et ses collègues démontrent sur une espèce d’amphibien – considérée comme une sentinelle de la qualité écologique de l’environnement – que la taille et la diversité génétique des populations de rainettes arboricoles sont plus faibles dans les zones les plus contaminées. Étonnante observation alors même que la migration d’individus depuis les zones environnantes est avérée. L’équipe de chercheurs met également en évidence une diminution de l’état des rainettes et une augmentation de mutations génétiques délétères. Autre observation : les modifications du métabolisme énergétique sont corrélées avec l’augmentation de la contamination radioactive dans les régions le plus fortement contaminées de cette zone d’exclusion. Ces changements pourraient constituer le facteur explicatif du déclin des populations de grenouilles dans cette région. Cette étude montre que les populations de rainettes restent encore aujourd’hui soumises à des changements nocifs. Elle souligne les impacts à long terme de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl sur la vie sauvage.

Un nouveau regard

Si vous pensez à un œil menaçant tout droit sorti d’un film fantastique, vous n’avez pas complètement tort. Il s’agit bien ici d’une menace, mais bien que loin de celle qui pèse sur la Terre du Milieu – ce continent fictif, théâtre de récits fantastiques ! Ce disque coloré traduit la température à la surface du bain formé par les matériaux fondus lors d’un accident grave à l’intérieur d’un réacteur nucléaire (mélange appelé « corium »). Les éléments fondus sont relocalisés dans le fond de la cuve, constituant ce disque dont le diamètre simulé est de 4 mètres. La zone centrale en rouge est la plus chaude. Ses bords en bleu sont refroidis. Dans le cadre de sa thèse menée au laboratoire d’étude de la physique du corium à l’IRSN et en collaboration avec l’Irphé (Institut de recherche sur les phénomènes hors équilibre), Florian Rein réalise des simulations numériques. Elles portent sur la fine couche de métaux fondus qui se forme en surface du bain de corium. Son danger ? Elle concentre l’énergie issue du cœur du réacteur. Elle entraîne, si elle n’est pas suffisamment refroidie, la rupture de la cuve, qui conduit à la dissémination du corium radioactif dans l’enceinte. La compréhension et la quantification des mouvements au sein de ces métaux liquides et du transport de chaleur qui en résulte sont nécessaires. Elles permettront d’affiner les modèles du code Astec (Accident Source Term Evaluation Code) développé à l’IRSN, qui simule les accidents de fusion du cœur. L’enjeu de sûreté est important pour les réacteurs pour lesquels la rétention du corium dans la cuve est prévue en cas d’accident grave. C’est le cas des futurs SMR (Small Modular Reactor).

Fragmentation explosive

S’agit-il de l’explosion d’un macaron à la violette ou d’un tableau peint avec la technique d’empâtement ? Ni l’un ni l’autre. Ce visuel est une simulation numérique de la fragmentation d’une goutte de corium surchauffée – mesurant à peine 4 mm de diamètre – dans l’eau. Les couleurs sont liées à la vitesse : plus elles tendent vers l’ocre, plus la vitesse relative par rapport à l’eau est élevée. Quatre scientifiques spécialisés en mécanique des fluides au Laboratoire d’étude de la physique du corium (LEPC), situé à Cadarache (Bouches-du-Rhône), étudient cette fragmentation. Pourquoi de tels travaux ?

C’est du billard

Un nouveau jeu est né : le billard microscopique ! À cette échelle, impossible d’utiliser une queue de billard ni même un cure-dent : seuls les écoulements d’air peuvent déplacer la « bille », une sphère de tungstène. Pour les scientifiques du Laboratoire de physique et métrologie des aérosols (LPMA), à Saclay (Essonne), la difficulté est de trouver pour quelles vitesses d’air cette bille roule et se détache. Ils analysent les diverses forces physiques – aérodynamiques et d’adhésion – qui agissent sur les particules produites dans des réacteurs de fusion nucléaire.

Ça barbote !

Léonard de Vinci s’est intéressé à la façon dont les bulles d’air remontent à la surface de l’eau. Est-ce de façon rectiligne ou en zigzaguant ? Pour les chercheurs du Laboratoire de radioécologie (LRC) de Cherbourg-en-Cotentin (Manche), la question n’est pas là. Au lieu de s’intéresser à leur trajectoire, ils souhaitent prédire la dispersion de radionucléides – l’iode 131, le césium 137... – en mer, en cas de rejets accidentels d’une centrale nucléaire. Sur cette photo, les bulles d’air présentes à la surface sont créées par l’agitation de 120 litres d’eau de mer par injection d’air comprimé au fond d’un bidon, à travers quatre tubes en plastique.

Dans la chambre à vide

L' assemblage en couleur évoque un jeu d’enfant. Les pépites d’or le parsemant sont des atomes radioactifs de tritium, et les boules bleues, une centaine d’atomes de béryllium. Chaque nuance de bleu représente une couche de béryllium dans la nanoparticule. Sacré « jeu d’enfant », car il faut six scientifiques pour résoudre l’énigme qui consiste à déterminer les capacités d’accumulation du tritium au sein des nanoparticules de béryllium. Les « joueurs » du Laboratoire de l’étude du transfert des radioéléments (LETR) à Cadarache (Bouches-du-Rhône) et de l’Université de Patras (Grèce) font équipe depuis 2017

Jeu de go

Vous croyez voir un plateau de jeu de société ? Vous êtes loin de la réalité. Vous observez le résultat d’une simulation numérique de la population de 80 millions de neutrons dans un assemblage combustible d’un réacteur nucléaire entreposé en piscine de désactivation. Parmi les 289 crayons constituant l’assemblage, 37 manquent. Chaque pixel de l’image est le résultat d’une statistique : le nombre et la vitesse des particules passées en ce point. Le bleu représente les neutrons modérés, c’est-à-dire ralentis par l’eau.

Pleins feux sur la cellule

Vous croyez regarder la lampe d’un projecteur ? Nous ne sommes pas au cinéma. Ce qui est visé ici est le cœur d’une cellule du vivant. Cette photo montre un support sur lequel sont placées des cellules, installées devant un microfaisceau d’ions qui les cible et les irradie. Sa grande précision permet d’atteindre leurs sous-structures, comme le noyau ou la mitochondrie, véritable centre énergétique cellulaire.

Le ver nous éclaire

Nu comme un ver, dit l’expression. Ce petit ver-là, un nématode, se met à nu pour aider les scientifiques à comprendre l’effet des rayonnements sur la reproduction. Transparent comme du verre, le marquage vert qu’il révèle – celui d’un gène impliqué dans la détermination sexuelle –informerait sur sa production de spermatozoïdes. Il constitue un bon modèle d’étude, car il est bien documenté sur les plans génétiques et moléculaires. Cette photo, obtenue au microscope inversé à fluorescence, est issue des travaux de thèse d’Élizabeth Dufourcq-Sekatcheff, écotoxicologue au Laboratoire de recherche sur les effets des radionucléides sur les écosystèmes à Cadarache (Bouches-du-Rhône). Son objectif : comprendre quand interviennent ces effets toxiques sur la reproduction. Les premiers résultats montrent une baisse de fertilité dès les premières heures d’irradiation, à des doses faibles et des stades de développement précoces. La prochaine étape vise à caractériser les mécanismes moléculaires en jeu. Une hypothèse est explorée : l’irradiation aurait un impact sur les lipides, indispensables pour la formation d’oeufs viables. Pour les étudier, la jeune écotoxicologue soumet des populations de nématodes à une exposition chronique aux rayonnements gamma (50 mGy/h), du stade oeuf aux différents stades de maturité : embryon éclos, jeune adulte, adulte. Ces travaux contribuent à mieux appréhender les effets de la radioactivité sur les écosystèmes. À plus long terme, ils pourraient améliorer les indicateurs de suivi et contribuer à une meilleure protection de l’environnement.

En plein poumon

Vous croyez voir une image tout droit sortie d’un jeu vidéo rétro, où la sphère rouge est un vaisseau ennemi à anéantir ? Vous êtes loin de la réalité. Il s’agit bien d’un combat, mais l’ennemi est tout autre. Cette tâche pourpre est une zone bien délimitée du poumon gauche (en bleu sur l’image) d’une souris transgénique traitée par radiothérapie stéréotaxique. Cette technique de haute précision, utilisant des mini-faisceaux convergents, permet d'irradier à haute dose de très petits volumes. Elle est utilisée en médecine depuis une dizaine d’années pour le traitement des cancers du poumon. Son intérêt est, entre autres, d’éviter la chirurgie chez certains patients – notamment ceux difficilement opérables – tout en gardant sous contrôle la prolifération de la tumeur. Qu’en est-il des risques associés ? Une nouvelle étude, menée par le laboratoire de radiobiologie des expositions médicales de l’Institut, révèle que la radiothérapie stéréotaxique induit un phénomène de sénescence, un vieillissement prématuré des cellules saines environnantes. Cette image – issue de ces travaux – a été publiée dans la revue International journal of radiation oncology, biology, physics. Elle a été obtenue avec l’irradiateur Sarrp (Small animal radiation research platform), un système d’irradiation dédié au petit animal. Dans le cadre du programme Rosiris, lancé par l’IRSN, ce travail doit identifier les mécanismes biologiques des effets secondaires des radiothérapies. Avec un prolongement possible : le développement de candidats médicaments qui pourraient les limiter.

Une goutte d’eau dans le vert

Cette buse génère des gouttelettes d’eau formant un beau rideau de pluie, nimbé du vert des lasers chargés de mesurer leur taille. Si l’image est poétique, les gouttes en question sont loin d’être anodines. Et pour cause : elles servent à capturer les aérosols issus de la découpe de matériau radioactif d’un réacteur nucléaire, nocifs en cas d’inhalation. En arrosant la zone de découpe, la buse que l’on voit ici permet leur collecte.

L’environnement sur le gril !

Cette élégante flûte traversière aux couleurs orangées n’est autre que l’intérieur d’un four à fusion alcaline. Son objectif ? Mettre en solution des échantillons de matière issus de l’environnement pour mesurer la présence d’éléments radioactifs – uranium, plutonium, américium...

Les chercheurs se mettent au vert

Sur une parcelle expérimentale, sous les vents dominants de l’usine Areva NC de La Hague (Manche), des chercheurs se font jardiniers. Ils cultivent l’herbe de prairie, dont nous voyons ici un échantillon. Le but : mesurer les transferts dans l’environnement du tritium (hydrogène radioactif), épisodiquement rejeté dans l’air par les cheminées de l’usine.