ZooParc de Beauval : les animaux passent à la radio

Un lion à radiographier, un orang-outang à scanner… à la clinique du parc zoologique de Saint-Aignan (Loir-et-Cher), les patients sortent de l’ordinaire. Si les règles de radioprotection restent classiques, leur application demande aux vétérinaires et aux auxiliaires… d’être malins comme des singes. 

Équipés d’un tablier plombé et d’un protègethyroïde, Baptiste Mulot, chef vétérinaire, et Karine Ecomard, ASV2 à la clinique, utilisent des bidons en plastique pour immobiliser la tortue et caler le capteur plan wifi (visible de dos). En s’éloignant du générateur de rayons X, ils limitent leur exposition. 

Juchée sur un bidon en plastique, sans pouvoir toucher terre, elle attend, anxieuse, la fin de sa radiographie. Sa posture pourrait sembler étrange, s’il ne s’agissait pas en réalité… d’une tortue, l’un des 10000 patients de Baptiste Mulot. « Nous lui mettons les pattes dans le vide pour éviter qu’elle ne bouge le temps du cliché. Cela fait partie des astuces à trouver lorsqu’on travaille dans un endroit comme celui-ci », explique le chef vétérinaire, directeur de la clinique depuis 2014 et personne compétente en radioprotection (PCR) de niveau 21 depuis 2009. La clinique dispose d’un poste de radiographie fixe, d’un générateur de rayons X mobile et d’un scanner. Pour chaque équipement, il existe des autorisations de mise en service et des procédures de radioprotection. En entrant dans la salle de radiologie, il est possible d’apercevoir, derrière une vitre, le bloc de chirurgie et, au fond de la pièce, une porte donnant accès au scanner. « Contrairement à la radio, le scanner n’est pas une pratique habituelle des vétérinaires : il faut parfaire son utilisation avec des animaux. Au-delà de son application médicale, c’est un outil qui sert à documenter des bases de données sur l’anatomie de nos pensionnaires. » En l’absence de normes pour les installations vétérinaires, les soignants appliquent celles en vigueur pour les humains. 

Des doses et une exposition faible 

À Beauval, avec en moyenne 1000 clichés par an – soit un animal à radiographier tous les deux jours –, l’activité n’est pas comparable à celle d’un hôpital. Et compte tenu de la faible puissance des rayonnements utilisés, les doses d’exposition restent limitées : entre 0,014 et 0,029 millisieverts par an en moyenne pour le corps entier. Classés B, les vétérinaires et ASV2 de la clinique portent tous un dosimètre passif individuel. Leurs données sont transmises trimestriellement à la plateforme Siseri de l’IRSN, qui regroupe les doses de tous les professionnels exposés en France. 

S’adapter au terrain pour les grands animaux 

Du fait de la taille des animaux ou pour limiter le recours à l’anesthésie, 20 % des clichés sont réalisés dans les enclos. Cette contrainte demande des aménagements spécifiques. Ce matin, Baptiste Mulot va examiner Black, une otarie mâle de 26 ans et de quelques centaines de kilogrammes. « Pour personnaliser notre dossier d’autorisation pour l’utilisation du poste mobile, j’ai modélisé tous les cas de figure: lorsque le tir est horizontal ou vertical, si l’animal est endormi ou pas, effectué en présence d’une ou plusieurs personnes… » Avec près de 750 espèces à suivre, il est important d’être bien préparé. 

 

1. Niveau de formation nécessaire pour l’utilisation de la radiologie en régime autorisation (scanner et poste mobile).
2. L’auxiliaire spécialisé vétérinaire (ASV) assiste le vétérinaire pendant les examens complémentaires et les opérations. Il est également exposé aux rayonnements ionisants. 

Scanner à rayons X

© ZooParc de Beauval

Le ZooParc de Beauval dispose d’un scanner. Il peut accueillir des patients jusqu’à 200 kilogrammes. Au-dessus de la porte d’entrée, des lumières rouge et blanche indiquent s’il est en fonctionnement. Toute ouverture des portes durant l’utilisation coupe immédiatement le générateur. Le personnel opère depuis une salle de contrôle plombée située dans une pièce adjacente. 

Indiquer les zones à risque

Derrière cette porte se trouve le bloc de chirurgie, où le personnel peut être amené à utiliser un générateur mobile. La signalétique rappelle les consignes de radioprotection et un dosimètre d’ambiance est installé dans la pièce. Sur le terrain, les soignants utilisent une pancarte mobile. Elle comporte un trèfle, délimite la zone d’intervention, indique le risque d’émission de rayons et interdit le passage. 

Une collaboration essentielle

Protégé par une housse noire, le capteur wi-fi est installé sous la nageoire de l’otarie Black. Pour limiter l’exposition, et ne toucher que l’animal, le tir se fait à la verticale. La croix rouge permet d’ajuster la position du faisceau. À proximité, Chloé Martin, soigneuse, contrôle et calme l’animal. Obligée de rester dans la zone surveillée, Chloé porte une tenue plombée et un dosimètre. 

Prévoir toutes les situations

Le dossier de radioprotection est nécessaire au suivi des professionnels, à leur formation et aux discussions avec les autorités. Il contient les évaluations dosimétriques et décrit les contextes d’intervention (ici l’animal à radiographier est représenté en orange). Pour chaque situation il précise les consignes et l’équipement requis. 

Former les employés

En tant que personne compétente en radioprotection (PCR), Baptiste Mulot forme les nouveaux personnels à la radioprotection. Il effectue un rappel chaque année. « La radioprotection ne se limite pas au simple équipement », insiste-t-il. Le fonctionnement des générateurs, du scanner, les notions théoriques sur la dosimétrie et les risques sont aussi expliqués. 

Reportage photos : © Célia Goumard/Médiathèque IRSN 


DIAPORAMA

Radiographie fixe d'une tortue à la clinique

Les petits animaux à radiographier sont amenés à la clinique. Afin de limiter leur stress, ils sont transportés dans des boîtes fermées. Ici, une tortue mâle. 

Avant de réaliser la radio, tous les opérateurs enfilent leurs protections plombées - tablier et protège-thyroïde - et s’équipent de dosimètres. 

Pour le premier cliché, la tortue est d’abord posée sur le capteur. Le générateur de rayons X est installé en position verticale afin de réduire la surface d’exposition et ne toucher que l’animal. 

Le générateur est ensuite installé en position horizontale afin de changer l’angle de prise de vue. L’animal est posé immobile sur un bidon plastique. À gauche, le capteur est maintenu à la verticale contre un autre bidon. 

La connexion wifi du capteur permet une consultation instantanée des clichés sur l’écran de l’ordinateur installé dans la salle de radiographie. L’éclairage réduit de la pièce améliore le contraste et facilite l’analyse. 

Mesures de radioprotection en mobilité

Avant d’aller dans le bâtiment des otaries, les vétérinaires préparent le matériel mobile : panneau de zonage, caisse métallique contenant le générateur mobile, équipements de radioprotection. 

Avant d’installer l’équipement de radiographie, Chloé Martin, une des soigneuses en charge des otaries, acclimate l’animal. Le bâton à bout en mousse permet de focaliser son attention. 

Une fois l’entraînement de l’otarie terminé, les vétérinaires endossent leurs combinaisons plombées dans le hall d’entrée du bâtiment. Ils s’équipent également de dosimètres. 

Un panneau de signalisation est installé pour indiquer la zone d’opération. Celle-ci est interdite à toute personne non équipée de protections. La prise des clichés peut débuter. 

Protégé par une housse noire, le capteur wifi est installé sous la nageoire de l’animal. Pour limiter l’exposition, le tir se fait à la verticale. La croix rouge permet d’ajuster la position du faisceau. 

Pendant toute l’opération, la soigneuse maintient l’animal immobile. Si elle reste calme, l’otarie sera récompensée par du poisson. 

 

Reportage photos : © Célia Goumard/Médiathèque IRSN 


Article publié en janvier 2020