Paratonnerres radioactifs : prévenir les risques à la dépose

Des milliers de paratonnerres radioactifs, ou « parads », sont présents sur nos toitures. Un collège de l’Essonne a fait appel à une entreprise agréée pour enlever le sien en toute sécurité pour la population et les travailleurs.

La dépose d’un paratonnerre radioactif nécessite l’intervention d’une société spécialisée. Ici, à bord d’une nacelle, l’assistant coordinateur de chantier, monte sur le toit d’un collège de l’Essonne pour enlever un parad.

En ce premier jour des vacances de la Toussaint1, les élèves et le personnel du collège Condorcet à Dourdan (Essonne) ont déserté l’établissement. L’occasion idéale pour « déposer » – enlever – le paratonnerre à tête radioactive (parads) situé sur le toit. Ils sont interdits depuis 19872, mais il en resterait 40000 en place, selon l’association Inaparad (Inventaire national des paratonnerres radioactifs).
Franklin France, entreprise spécialisée dans la protection contre la foudre, a été choisie par le collège pour la dépose. Grâce aux fiches de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), le type de parad et le radionucléide présent ont été identifiés. Il s’agit d’un modèle à plots radioactifs de la marque Hélita3, contenant du radium 226. Dès 8h30, Smahine Boufeldja, assistant coordinateur de chantier, et Alban Ossart, responsable qualité sécurité environnement, sont sur place avec une nacelle télescopique.

Pas moins de quatre dosimètres 

Première étape : préparer la zone d’intervention et le périmètre de sécurité. Afin d’éviter toute contamination par les poussières radioactives, l’assistant coordinateur de chantier utilise un équipement de protection individuelle (EPI) à usage unique. Il porte trois dosimètres passifs – doigt, poignet, poitrine – et un dosimètre opérationnel qui contrôle la dose reçue en temps réel. Et c’est parti! Pilotant sa montée depuis la nacelle, Smahine Boufeldja parvient à hauteur du paratonnerre. À l’aide d’une disqueuse, il découpe les deux attaches du mât. « La difficulté est de ne pas faire tomber le parad, qui pèse plus de 20 kg », souligne-t-il. Une fois redescendu, il découpe la tête et les trois tiges appelées « moustaches ». Il met ces éléments radioactifs dans un sac en aluminium plastifié fermé par un ruban adhésif. L’emballage et les EPI sont conditionnés dans un fût, lui-même glissé dans un deuxième, telle une poupée russe. Ce dernier est scellé et étiqueté. 
Le débit de dose au contact et à un mètre du fût est mesuré. « Cela sert à déterminer l’indice de transport, de 0 à 10, explique Alban Ossart. Il est de 1 lorsque le débit de dose maximum mesuré à un mètre du colis est de 10 μSv/h. Notre entreprise est autorisée à transporter des colis dont l’indice est inférieur à 3. La législation nous impose de remplir un “document de transport” comportant ces renseignements. » L’équipe vérifie qu’aucune partie radioactive ne reste sur le site, la zone d’intervention est nettoyée. Le fût est solidement arrimé dans le camion, identifié par une plaque orange indiquant le code du danger et par une autre avec son symbole (classe 7 : matière radioactive). Le fût est entreposé dans le site de stockage de Franklin France, en Seine-et-Marne. L’ensemble de l’opération a duré une bonne heure. 

1. Reportage publié dans Repères n° 32, en février 2017. 
2. Sont interdits depuis 1987 l’emploi des radioéléments pour la fabrication des paratonnerres ainsi que leur commercialisation et leur importation (arrêté du 11 octobre 1983).
3. La société Hélita a été la première à commercialiser des parads en France. 

Se protéger avec un EPI et suivre sa dosimétrie

Smahine Boufeldja porte un équipement de protection individuel (EPI) à usage unique. Ici à son poignet, un des trois dosimètres passifs. En conformité avec la réglementation, ils permettent de s’assurer que les limites d’exposition au niveau de la peau et des extrémités ne sont pas dépassées. 

Mesurer le débit de dose

La tête du parad est déposée sur une feuille en plastique. L’assistant coordinateur de chantier mesure le débit de dose autour. Une zone d’intervention de 5 mètres de rayon a été balisée pour interdire l’accès à toute personne extérieure. 

Les éléments radioactifs sont mis en fût avant le transport

La tête du paratonnerre et les autres éléments radioactifs sont placés dans un sac en aluminium. Ce dernier est mis dans un fût, lui-même glissé dans un autre, en attendant le transport. 

Le fût est transporté conformément aux règles de sécurité

Le colis est placé dans le coffre du véhicule, le plus loin possible du chauffeur. Il est calé solidement à l’aide de sangles et de crochets. Le conducteur reviendra au lieu de stockage par le chemin le plus direct. L’Andra prendra ensuite en charge le colis.

Crédit reportage photo : Florence Levillain/Signatures/IRSN

Pour en savoir plus


DIAPORAMA

Le suivi dosimétrique du professionnel

Port d’un dosimètre corps entier. Avant de déposer un paratonnerre radioactif, Smahine Boufeldja, assistant coordinateur de chantier chez Franklin France, accroche un dosimètre RPL mesurant l’exposition "corps entier" aux rayonnements bêta et gamma.

… d’un dosimètre à lecture immédiate. Le dosimètre opérationnel contrôle la dose reçue en temps réel. ((Crédit photo))

… d’un bracelet dosimétrique. Il mesure la dose de radioactivité cumulée reçue au niveau des mains et des bras lors de la manipulation du paratonnerre.

… et d’un dosimètre doigt. Une bague dosimétrique mesure les rayonnements alpha des extrémités qui manipulent le paratonnerre. En tout, Smahine Boufeldja porte quatre dosimètres pour contrôler la dose de radioactivité cumulée.

Comment mettre et enlever un EPI

Port obligatoire d’un équipement individuel à usage unique. Avant de déposer un paratonnerre radioactif, Smahine Boufeldja, assistant coordinateur de chantier chez Franklin France, doit utiliser un équipement de protection individuel (EPI).

… d’un masque de protection respiratoire. Il évite la contamination interne par respiration d'éventuelles poussières radioactives durant la découpe des éléments radioactifs du paratonnerre.

… de gants de protection. Smahine Boufeldja sort les gants de leur sachet de protection.

Enlever l’EPI sans toucher l’extérieur. Alban Ossart, personne compétente en radioprotection (PCR) chez Franklin France, aide le coordinateur de chantier à retirer sa combinaison et ses gants. Personne ne doit toucher la surface extérieure de l’EPI pour éviter toute contamination.

Les EPI usagés deviennent des déchets radioactifs. Les équipements de protection usagés – gants, masque et combinaison – sont placés dans un sachet hermétique. Ce déchet radioactif partira dans les fûts de transport vers le centre de stockage de Franklin France.

Crédit reportage photo : Florence Levillain/Signatures/IRSN


Article publié en octobre 2019