Sources radioactives : protection contre la malveillance

300 établissements en France utilisent quelque 5 000 sources radioactives scellées de haute activité. De nouvelles dispositions réglementaires pour les protéger contre les actes malveillants reposent sur trois principes : détection, retard et intervention. Comment sont-elles mises en application ?

A gauche : La casemate de gammagraphie de cet industriel est entourée d’une enceinte fermée. Seuls les contrôleurs ont les clés des accès. A droite : Les barbelés sont une mesure de sécurité très répandue sur les sites industriels. Ils dissuadent et retardent l’accès - © Sophie Brändström/Signatures/Médiathèque IRSN.

TÉMOIGNAGE - Fabrice Nos : “Il faut protéger les informations sensibles”

Fabrice Nos, conseiller en radioprotection et à la sécurité du transport de matières dangereuses chez Schlumberger, responsable des activités nucléaires (RAN). - © F. Nos

“Notre entreprise intervient lors des forages. Elle repère par diagraphie les couches géologiques renfermant des hydrocarbures. Cette technique utilise des sources de haute activité qui relèvent des catégories D et B (voir informations pratiques). Leur bunker de stockage constitue une source dite « en lot » de catégorie B. Cette classification dicte les niveaux de sécurité.
La société est organisée pour faire face à des scénarios d’intrusion et satisfait déjà presque 90 % des nouvelles exigences réglementaires. L’identification avec un accès nominatif aux sources est en place depuis 2009. Depuis 2006, le véhicule de transport a une sécurisation accrue par GPS.

Des retardateurs d’accès

La première phase de l’arrêté exige de protéger les informations sensibles. Pour concilier l’information sécurité – disponible pour chacun – sans divulguer les clés de la sécurisation, j’opte pour deux documents. Celui qui décrit les précautions entourant nos sources est en accès restreint : chef d’établissement, conseillers en radioprotection et responsable des activités nucléaires. L’accès aux sources, déjà sécurisé, sera renforcé en mode gradué. Tout salarié concerné fournira un extrait de casier judiciaire. Pour ceux ayant accès à l’ensemble – dont moi-même – une enquête administrative sera demandée.
L’arrêté exige la mise en place des retardateurs d’accès d’ici 2022. Nous sommes en règle. Cependant, nous passerons du cadenas mécanique à une version plus sophistiquée, à clé électronique individuelle, désactivable à distance en cas de perte ou de vol. Un identifiant et un mot de passe assurent leur traçabilité et les données – accès, ouvertures, etc. – sont sauvegardées. Pour la lutte anti-intrusion, la détection et l’intervention sont opérationnelles. Nous prévoyons davantage d’exercices pratiques pour éprouver la procédure.  


INFOGRAPHIE - Quels dispositifs pour protéger des sources contre la malveillance ?

Dispositifs anti-intrusion, protocole d’alerte… L’arrêté du 29 novembre 2019 édicte de nouvelles règles pour renforcer la sécurité entourant les sources radioactives. Illustration des trois phases de son application dans un centre de curiethérapie doté d’une source à haut débit.  

© Art Presse/ABG Communication/Médiathèque IRSN Magazine Repères

AVIS D'EXPERT - Caroline Jacquelin : “L’arrêté s’inspire de pratiques réelles”

Caroline Jacquelin, en charge de sécurité nucléaire - © Coll. Part

Pour élaborer la réglementation 2019 visant à mieux protéger les sources radioactives, l’IRSN a apporté un appui technique aux autorités de sécurité et de sûreté nucléaire. Afin de proposer des techniques et des organisations pertinentes, nous sommes partis du terrain, en observant les pratiques, protections en place, difficultés… des détenteurs de sources dans cinq services de l’Institut.
Conformes à la réglementation de santé et de sécurité au travail, ces installations révèlent parfois des contradictions entre la radioprotection et la lutte contre la malveillance. Exemple : la mise à disposition d’une clé qui facilite l’accès en cas d’intervention d’urgence induit un risque d’intrusion pouvant aboutir au vol d’une source. L’arrêté devait prendre en compte les spécificités des établissements de santé et des sites industriels. C’est le cas, grâce à la contribution d’une spécialiste de l’expertise des sources de l’Institut.
Pour certains, la culture de sécurité – initiée avec le décret 2018 – est un concept nouveau. Les réflexes de lutte contre la malveillance ne sont pas automatiques : anticiper une agression volontaire, retarder l’accès à la source, être aussitôt alerté de l’intrusion, confirmer sa réalité, etc. L’arrêté 2019 précise aux détenteurs les modalités à suivre pour se mettre graduellement en conformité. La méthode pragmatique utilisée devrait faciliter sa mise en application. 


INFORMATIONS PRATIQUES

Sources radioactives

Toutes les sources radioactives sont classées en quatre catégories en fonction de leur dangerosité. Par ordre décroissant, on distingue les catégories A, B, C et D. Parmi les sources répertoriées à l’inventaire national, 30 % sont inférieures aux seuils et le reste se répartit de la manière suivante : 81 % D, moins de 1 % C, 7 % B et 11 % A. Pour connaître les critères de classement, voir le décret n° 2018-434 du 4 juin 2018. 

 

Textes réglementaires  

Arrêté modifié du 29 novembre 2019 relatif à la protection des sources de rayonnements ionisants et lots de sources radioactives de catégories A, B, C et D contre les actes de malveillance. Cet arrêté fixe les modalités de protection, notamment contre les menaces de vol. • Décret n° 2018-434 du 4 juin 2018 portant diverses dispositions en matière nucléaire, Art. R. 1333-147 du code de la santé publique 

 

Les sources concernées

L’arrêté vise les sources de rayonnements ionisants et lots de sources radioactives de catégories A, B, C et D définies par l’annexe 13-7 du code de la santé publique. La catégorie est établie selon l’article R. 1333-14 du code de la santé publique. Si un doute existe quant au caractère scellé ou non de la source, appliquer les dispositions valables pour une source scellée. Ces dispositions ne s’appliquent pas aux sources qui sont des matières nucléaires au sens de l’article L. 1333-1 du code de la défense. 

Une borne de contrôle biométrique sécurise l’accès aux sources. - © Sophie Brändström/Signatures/Médiathèque IRSN

POUR EN SAVOIR PLUS


CONTACT

  • Unité d’expertise des sources

    BP 17 92262 Fontenay-aux-Roses Cedex Tél. secrétariat : 01 58 35 95 13 ou 01 58 35 90 00


Article publié en novembre 2020